GROUPE COGNITION HUMAINE

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M. Denis

Exemples d'Activité de Recherche du groupe

INTRODUCTION

Au terme des quatre années du soutien spécifique reçu du Programme Cognisciences du CNRS, puis du GIS Sciences de la Cognition, le groupe Cognition Humaine constitue l'une des quatre composantes du Département Communication Homme-Machine. Les travaux du groupe s'appuient sur une démarche théorique et une méthodologie qui sont celles de la psychologie cognitive expérimentale et qui donnent leur spécificité aux opérations menées par le groupe au sein du LIMSI. L'objectif des membres du groupe est de rendre compte des processus par lesquels les individus traitent l'information extraite de leur environnement et en construisent des représentations utilisables dans leurs conduites. Les connaissances acquises sur la construction de représentations mentales à partir du traitement du langage sont mises au service des travaux pluridisciplinaires menés dans le laboratoire sur les formes naturelles et artificielles de l'intelligence et sur la communication homme-machine.

Au cours des années, les travaux du groupe Cognition Humaine ont exploré trois grands thèmes : le rôle de l'image et du langage dans la cognition spatiale ; la compréhension de textes ; l'acquisition et la représentation des connaissances. L'année passée, une restructuration a été opérée, sous la forme du regroupement des deux derniers thèmes. Ce regroupement a été motivé par la proximité des objets traités au sein des deux équipes concernées et le souhait d'y favoriser les collaborations. En outre, cette formule a paru souhaitable afin d'approcher un meilleur équilibre des potentiels de recherche entre les deux nouvelles équipes ainsi reconfigurées.

Dans cette nouvelle organisation, la première équipe (Image, Traitement du Langage et Cognition Spatiale) poursuit ses objectifs de recherche sur le rôle de l'image et du langage dans la construction de représentations mentales de configurations spatiales. Cette étude permet de rendre compte des processus de communication par lesquels des individus échangent des connaissances sur leur environnement et inscrivent ces connaissances en mémoire en vue d'utilisations ultérieures. Les résultats de ces travaux sont mis au service de la conception de systèmes informatisés d'aide à la navigation. En outre, une collaboration étroite et continue avec une équipe d'imagerie neurofonctionnelle du CEA permet à l'équipe de contribuer à la connaissance de l'architecture cérébrale intéressée par le traitement de l'image et du langage.

Les recherches de la nouvelle équipe (Compréhension de Textes et Acquisition de Connaissances) abordent différents niveaux du traitement cognitif des textes. Elles visent d'abord à rendre compte de l'organisation des signifiés en mémoire sémantique et des modalités d'accès à cette mémoire. L'objectif est de modéliser le réseau associatif au moyen d'un système connexionniste. Les travaux analysent également le rôle des inférences dans la compréhension, ainsi que les structures argumentatives utilisées dans les textes destinés à transmettre des connaissances scientifiques. L'analyse des représentations élaborées au cours de la compréhension donne une importance particulière aux processus mis en oeuvre dans le traitement des analogies et des métaphores.

THÈME 1 : IMAGE, TRAITEMENT DU LANGAGE ET COGNITION SPATIALE

M. Denis, M. Bollaert, S. Bricogne M. Cocude, M.-P. Daniel, G. Fernandez, S. Fontaine, O. Ghaëm, Y. Pigenet

Les travaux menés sur ce thème portent sur les interactions de l'image et du langage dans la construction de représentations mentales de configurations spatiales. L'étude de ces interactions est particulièrement importante pour rendre compte des processus de communication entre agents cognitifs (naturels ou artificiels) appelés à échanger des connaissances sur leur environnement spatial. Nos travaux s'inscrivent dans un contexte international qui comporte une dimension européenne significative, grâce au soutien reçu de l'Union Européenne au titre de Programme Capital Humain et Mobilité. Au groupe d'Orsay (coordinateur du projet) ont été associées des équipes d'Aberdeen, Padoue, La Laguna, Sarrebruck et, plus récemment, Helsinki et Dresde. Au plan international, nos contacts réguliers avec S. Kosslyn (Harvard) et B. Tversky (Stanford) aboutissent à la mise en oeuvre de projets communs.

Génération d'images mentales à partir de descriptions verbales

Nos expérimentations analysent les processus cognitifs mis en oeuvre lorsque des individus construisent la représentation interne de configurations spatiales à partir des descriptions verbales de ces configurations. Les analyses sur les processus de génération et les processus de maintien de l'image confirment la différenciation fonctionnelle de ces deux familles de processus. D'autre part, les analyses chronométriques de l'exploration mentale de distances attestent la capacité de ce type de représentation à refléter la métrique des configurations imaginées. Elles sont étendues à des situations expérimentales dans lesquelles nous mettons en évidence la compositionalité des durées d'exploration mentale. Enfin, la rédaction, avec S. Kosslyn, d'un article-cible nous a permis d'établir un bilan critique approfondi de vingt ans de recherche sur l'exploration mentale.

Le travail de modélisation impliquant la comparaison d'images générées à partir d'entrées perceptives ou d'entrées linguistiques s'est poursuivi, avec la réalisation d'une expérience d'amorçage spatial. Les résultats révèlent en particulier le coût cognitif des réponses faisant appel à des inférences sur des relations spatiales non explicitées dans la description verbale de la configuration. La thèse issue de ce travail sera soutenue cette année.

Processus cognitifs et stratégies linguistiques dans la description de configurations spatiales

Nous avons poursuivi notre analyse des processus de linéarisation discursive dans la description de configurations spatiales. Des variations expérimentales sur le paradigme de Levelt ont permis de mettre en évidence la stabilité des stratégies descriptives pour différents types de matériel et différents contextes de description. Un nouveau programme de recherche consiste à analyser la représentation mentale des déplacements au sein de configurations mémorisées soit à partir d'une carte, soit à partir d'une description verbale. Le paradigme de Morrow et Bower offre la possibilité d'étudier les processus d'activation différentielle (comparables aux processus de focalisation en perception visuelle) pendant la lecture de textes décrivant les déplacements d'un personnage dans un environnement spatial complexe. Les résultats confirment la plus grande accessibilité des objets situés dans les régions de l'environnement traversées par le personnage. Sur ce thème, un travail de thèse est en cours (allocation Sciences Cognitives) et des collaborations sont engagées avec M. de Vega (La Laguna) et M. Rinck (Dresde).

Processus cognitifs mis en oeuvre dans la description d'itinéraires

L'analyse des processus cognitifs mis en oeuvre dans la description d'itinéraires et dans l'aide à la navigation occupe une place majeure dans notre programme expérimental. Nous poursuivons le recueil de corpus de descriptions dans des environnements variés (campus, environnements urbains) et la classification des propositions issues de leur analyse. Nous avons mis en évidence la robustesse de la structure des descriptions produites dans des situations contraintes (par exemple, lorsque le sujet doit produire une description concise) et nous avons engagé une étude sur la production de descriptions en situation collective. Une thèse CIFRE vient d'être engagée (avec la RATP) sur la description d'itinéraires au sein du réseau du métro parisien. Par ailleurs, dans une collaboration récemment engagée avec J.-L. Nespoulous (Toulouse), nous utilisons la description d'itinéraires comme indicateur des dysfonctionnements de la cognition spatiale dans différents tableaux neuropsychologiques (lésions pariétales, lésions frontales, maladie d'Alzheimer). Cette recherche est soutenue par un contrat du GIS Sciences de la Cognition.

Les études de validation utilisent des tâches de compréhension et de mémorisation. Une thèse DGA est en cours sur ce thème, avec une comparaison des effets d'une activité d'imagerie impliquant une prise de perspective en survol ou en trajet. Une collaboration mise en place avec R. Logie (Aberdeen) doit permettre de mesurer l'effet de tâches secondaires (faisant appel à la mémoire de travail visuelle ou verbale) sur le traitement. Nous étudions également les conditions cognitives du traitement d'informations signalétiques combinant des éléments verbaux et iconiques. Enfin, une recherche menée avec C. Cornoldi (Padoue) nous a permis de mesurer l'incidence des descriptions verbales sur la performance de navigation dans un environnement urbain complexe (la ville de Venise). Ces travaux fournissent un ensemble de spécifications utilisables par les concepteurs de systèmes informatisés d'aide à la navigation. Une recherche conduite en coopération avec PSA Peugeot Citroën nous permet d'étudier les dialogues de navigation entre pilote et copilote à bord d'un simulateur de conduite, avec un intérêt particulier pour les dialogues survenant à l'approche des carrefours. Cette recherche, menée avec X. Briffault (du groupe Langage et Cognition), s'inscrit parmi les travaux coordonnés par la Plate-Forme Multimodale du LIMSI et fait l'objet d'un contrat avec le GIS Sciences de la Cognition.

Structures cérébrales impliquées dans la génération de représentations visuo-spatiales

La poursuite de notre collaboration avec le Groupe d'Imagerie Neurofonctionnelle de B. Mazoyer (GIP Cyceron, Caen) nous permet de recueillir, à l'aide de la tomographie par émission de positons, des données originales sur les régions cérébrales impliquées dans la représentation mentale de scènes visuelles. Nos données attestent la mise en activité d'un réseau occipito-pariéto-frontal dans des activités d'imagerie générées à partir d'entrées uniquement verbales. La question de l'implication des aires visuelles primaires (dont l'activation n'est pas retrouvée dans nos expériences alors que d'autres auteurs la retrouvent) placent nos travaux au centre d'un débat très actuel. Le séjour sabbatique de S. Kosslyn dans nos laboratoires a permis le lancement d'une expérimentation destinée à élucider le rôle du cortex visuel dans la génération et l'inspection d'images impliquant un degré élevé de résolution.

D'autres travaux, auxquels est associé A. Berthoz (Collège de France), portent sur la simulation mentale de déplacements dans des environnements appris par navigation ou bien à partir d'une carte. Les résultats révèlent l'implication de la formation hippocampique dans la simulation mentale des déplacements. Une nouvelle recherche examine l'activité cérébrale accompagnant la visualisation mentale d'environnements décrits soit en perspective trajet, soit en perspective survol, selon la distinction introduite par B. Tversky. Ces travaux sont menés dans le cadre de deux thèses (allocation Sciences Cognitives et Cyceron-Région) et avec le soutien d'un contrat du GIS Sciences de la Cognition.

THÈME 2: COMPRÉHENSION DE TEXTES ET ACQUISITION DE CONNAISSANCES

J.-P. Rossi, B. Boutanquoi (ASC 1996-97), R. Bussone, N. Campion, M. Cornuéjols, M.-D. Gineste, A. Guha, J.-F. Le Ny, V. Scart-Lhomme

Au cours de l'année écoulée, trois opérations de recherche ont été menées. La première porte sur l'organisation du lexique. La seconde a trait à la compréhension de textes et à la construction de la représentation de leur contenu. La troisième analyse les représentations mises en oeuvre dans la compréhension des métaphores.

Organisation du lexique

Dans le cadre de l'étude du lexique, l'analyse des relations entre l'amorce (mot présenté au sujet) et la réponse associative (mot associé produit par le sujet) a montré la prédominance de deux types de réponses: d'une part, des réponses de description qui caractérisent ou définissent l'objet dénommé et, d'autre part, des associations qui le situent dans son contexte. L'importance des réponses de type contextuel plaide en faveur d'une organisation en événements constitutifs de la mémoire épisodique. Le rôle de la mémoire épisodique dans l'organisation du système associatif apparaît comme prédominant. Une tentative de modélisation du réseau associatif au moyen d'un système connexionniste est en cours d'élaboration. Une bourse DGA a été obtenue dans ce cadre et une bourse CIFRE a été demandée.

L'organisation du système associatif correspondant aux mots composés a été étudiée en utilisant la technique de l'amorçage: mot composé-amorce suivi par un mot simple-cible sur lequel le sujet procède à une décision lexicale. Les mots composés étaient formés soit de deux noms communs, soit d'un verbe et d'un nom. Les résultats indiquent que l'activation de la signification du mot composé est systématique. Pour les mots composés nom-nom, la signification des deux éléments est activée, tandis que pour les mots composés verbe-nom, le verbe n'active pas les signifiés qui lui sont attachés. L'accès au réseau associatif des verbes reste à préciser.

Compréhension de textes

L'étude des inférences élaborées lors de la compréhension de textes a été centrée sur l'analyse des inférences optionnelles, c'est-à-dire des inférences qui permettent au lecteur de compléter sa représentation du contenu du texte au moyen des connaissances du monde. Ces inférences sont distinctes des inférences qui établissent les relations causales, référentielles et spatiales entre les informations fournies par le texte. Le rôle de la force des associations sémantiques lors de la production des inférences optionnelles a fait l'objet de recherches expérimentales dont les résultats indiquent que ces associations facilitent la génération des inférences et augmentent leur intégration dans la représentation, sans pour autant affecter les relations causales. Ainsi, il est montré que des inférences optionnelles, non liées à la cohérence causale de la représentation, sont élaborées au cours de la lecture.

Analogie et métaphore

Un pôle de recherche s'est développé sur la question des représentations actives durant la compréhension des métaphores poétiques. S'agit-il de représentations correspondant aux traits partagés entre la topique (l'objet qui est décrit dans la métaphore) et le véhicule (ce par quoi cet objet est décrit), ainsi que le postule la théorie de la comparaison ? Ou bien s'agit-il de traits nouveaux comme le suggère la théorie de l'interaction ? Dans ce cas, ces traits sont-ils réellement nouveaux (et alors, d'où viennent-ils ?) ou bien ne sont-ils pas plutôt des traits qui deviennent accessibles dans le traitement de la métaphore et qui antérieurement n'avaient pas atteint un niveau suffisant d'activabilité ?

Une série d'expériences a été menée. Les résultats ont montré que les traits produits en situation de production sont en majorité des traits qui n'ont pas été produits pour décrire les topiques ou les véhicules pris isolément. Pour les temps de décision de compatibilité sémantique, les traits "émergents" nouveaux sont reconnus plus rapidement après la métaphore que des traits caractérisant la topique ou le véhicule. L'optimum des temps se situe à 2000 ms après la lecture de la métaphore. Enfin, les traits caractéristiques de la topique et du véhicule demeurent encore actifs après la lecture de la métaphore même si ce sont les traits émergents qui l'emportent. Une thèse sur ce sujet sera soutenue cette année.

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