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Objet
Dans cette étude, nous nous sommes intéressées aux processus mis en oeuvre au moment de la compréhension des métaphores poétiques et aux représentations élaborées et activées pendant le traitement. S'agit-il, comme le propose l'hypothèse de la comparaison des traits caractéristiques des concepts impliqués, de l'activation des traits sémantiques partagés et de l'inhibition simultanée des traits non pertinents ? Ou bien s'agit-il de la création de nouveaux traits (ce que défend la théorie de l'interaction), condition nécessaire pour que la comparaison soit comprise ?
Contenu
Cinquante-deux métaphores ont été sélectionnées dans des textes poétiques français et ont été soumises à 33 sujets, étudiants en licence et en maîtrise de lettres. Chaque sujet recevait, d'une part, la liste des topiques et véhicules extraits de 26 métaphores et, d'autre part, les 26 autres métaphores. Dans une condition, les sujets avaient pour tâche de donner par écrit, pour chaque mot ou métaphore présentés, trois concepts ou propriétés qui leur paraissaient fortement liés. Dans une autre condition, les sujets devaient se représenter mentalement chaque mot ou métaphore et rapporter par écrit les trois images le plus fortement associées.
Dans l'analyse des résultats, nous faisons la distinction entre plusieurs classes de traits : (a) les traits communs à la métaphore et à sa topique ; (b) les traits communs à la métaphore et à son véhicule ; (c) les traits "émergents". Nous appelons "émergents" les traits associés uniquement à la métaphore, qui n'appartiennent pas aux séries de traits de la topique et du véhicule. Un exemple des résultats obtenus pour une métaphore est présenté ci-contre. Les traits émergents représentent un pourcentage élevé (70%) du total des traits produits lors de l'interprétation d'une métaphore.
Malgré des consignes différentes (production d'images ou de concepts), les sujets produisent dans ces deux situations les mêmes catégories de réponses. Ainsi, les traits s'expriment sous forme de mots désignant des objets (par exemple, "velours", "bouche"), de mots désignant des expériences sensorielles ("douceur", "chaleur") et de mots généraux ou abstraits non directement liés à la sensorialité ("érotisme", "fécondité"). Parmi les mots désignant les traits émergents, 26,8 % désignent des objets facilement traduisibles sous forme d'image, 22,7 % sont liés à la sensorialité et 50,5 % sont des mots non liés à la sensorialité. Il semble justifié de rassembler les deux premières catégories dans une même notion globale de sensorialité.
Situation
Les résultats recueillis indiquent que l'interprétation d'une métaphore implique deux domaines sémantiques, l'un lié à la sensorialité, l'autre non. Ils appuient notre hypothèse selon laquelle la représentation de la métaphore est constituée de traits qui lui sont propres, issus du domaine de la sensorialité, et qui, par combinaison et association, permettent la construction de la représentation. Cette représentation exprime la ressemblance abstraite qui existe entre la topique et le véhicule. Une expérience actuellement en cours vise à confirmer ces résultats par l'utilisation de techniques chronométriques.
Références
(1) Gineste, M.-D. (sous presse). Analogie et cognition. Paris : Presses Universitaires de France.
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