Images et représentations mentales de l'espace chez les personnes non-voyantes
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A. Afonso, F. Gaunet etM. Denis
Objet
L'objet de cette étude a été de déterminer si l'information métrique conservée dans les représentations mentales de configurations spatiales élaborées sur la base de descriptions verbales est tributaire du caractère visuel de ces représentations ou bien si cette information est indépendante de la modalité visuelle.
Description
Les travaux de M. Denis ont mis en évidence que dans des conditions appropriées d'apprentissage, les représentations mentales construites à partir d'informations visuelles, mais aussi à partir d'informations verbales, présentent un isomorphisme structural à l'égard des objets ou des environnements dont elles assurent l'évocation. Cet isomorphisme s'exprime, notamment, à travers le positionnement relatif des repères dans une configuration. Dans la présente recherche, nous nous sommes intéressés aux propriétés métriques des représentations mentales de configurations spatiales élaborées à partir d'une description verbale de l'environnement. Les repères ont été positionnés à l'aide d'un codage de type horaire (<< Le port est à 11 heures, le phare est à 1 heure, etc. >>) (Figure 1). La tâche des participants a été ensuite d'effectuer mentalement des comparaisons entre différentes paires de distances (par exemple, est-ce que la distance entre le port et le phare est plus grande que la distance entre le port et la plage ?).
Afin de mettre en évidence le rôle de l'expérience visuelle dans la conservation de ces propriétés métriques, nous avons proposé cette tâche à des personnes non-voyantes. En effet, l'étude des représentations mentales des personnes non-voyantes et notamment non-voyantes de naissance doit être particulièrement informative à ce sujet. Des personnes non-voyantes de naissance (NVN), non-voyantes tardives (NVT) et voyantes privées de vision par le port d'un bandeau (VPV) (9 participants par groupe, appariés) ont effectué le protocole expérimental décrit ci-dessus. Elles ont été invitées à comparer mentalement des paires de distances. Une analyse de leurs réponses, et notamment des temps de réponse, a été effectuée [1, 2].
Résultats et perspectives
Aucune différence significative n'apparaît entre les groupes sur le pourcentage de réponses correctes (Figure 2). Ce résultat est compatible avec l'hypothèse que l'expérience visuelle ne joue pas de rôle crucial dans la capacité à se représenter mentalement les relations métriques entre objets au sein d'un environnement décrit. Toutefois, l'analyse des temps de réponse fait apparaître que les personnes voyantes privées temporairement de vision répondent de manière systématiquement plus rapide que les personnes aveugles, sans qu'il existe de différence entre les temps de réponse des non-voyants de naissance et des non-voyants tardifs (Figure 3). Enfin, les données confirment le résultat classique : plus une différence entre deux distances est petite, plus le temps nécessaire pour les comparer mentalement est important, et cela pour tous les groupes. Au total, si les représentations mentales peuvent être considérées comme reflétant de manière analogique la configuration dont les individus ont reçu la description, les données n'apportent pas d'argument en faveur d'une composante visuelle indispensable de ces représentations analogiques.
Références
[1] Afonso, A. : << Images et représentations mentales
de l'espace chez les personnes non-voyantes de naissance, non voyantes
tardives et voyantes privées de vision : le rôle de l'expérience visuelle >>.
Mémoire de DEA de Sciences Cognitives, LIMSI-CNRS, Université
de Paris-Sud, Orsay, 2001.
[2] Afonso, A. : << Images et représentations mentales de l'espace chez
les personnes non-voyantes : le rôle de l'expérience visuelle >>.
Journées du Réseau de Sciences Cognitives d'Ile-de-France,
Paris, 26-27 octobre 2001. (Communication affichée.)
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